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LA DISCIPLINE CANONIQUE DE L’EGLISE ORTHODOXE

 

 Si je crois vraiment, comme je l’affirme si souvent dans le Credo, « en l’Eglise », je ne peux pas ignorer, que cela me plaise ou me dérange, les textes que l’Eglise a rédigés au cours des siècles et que l’on appelle les canons. Ces derniers ont pour finalité de définir les limites de la vraie vie, que le chrétien ne peut dépasser sans sortir de cet acte générateur par lequel le Père céleste le traite comme son Fils unique, c’est-à-dire lui fait le don divinisant de son saint Esprit.

Les canons ecclésiastiques nous tracent le chemin à parcourir afin que notre vie dans l’Eglise ne soit pas une vie sociale naturelle, pour que nous dépassions l’autonomie de notre individualité naturelle en acquérant le saint Esprit, en faisant l’expérience de la déification. (…) Mais pour cela nous devons éviter deux erreurs. L’une consisterait à dire que le passé est dépassé, qu’en ce début de troisième millénaire, il est grand temps d’effectuer un aggiornamento. Penser ainsi, ce serait méconnaître complètement la dimension diachronique et synthétique, sans rupture à travers le temps de la Tradition ecclésiale et de l’unité de l’Eglise.

Si les canons ecclésiastiques nous parlent avant tout des conditions de possibilité de notre divinisation dans l’être-en-communion de l’Eglise, la vraie vie dont ils parlent, c’est aussi bien la vraie vie pour nous, si éloignés que nous soyons de leurs auteurs dans le temps. Cependant il y a une seconde erreur dont il faut se garder : il ne faut pas massacrer les chrétiens à coup de canons en les mitraillant fanatiquement par une application automatique des canons. En 2003, allons-nous excommunier un chrétien qui quitte l’église avant l’anaphore sans motif de santé ?

Un meurtrier qui s’est repenti, le priverons-nous de communion jusqu’à la fin de sa vie, et durant sept ans quelqu’un qui a commis un adultère ? Le bon usage des canons consistera à considérer que si, dans l’Antiquité, la sainte Eglise, pourtant si bonne, si maternelle, s’est montrée si sévère, c’est que, de nos jours encore, le péché est extrêmement grave et que, par conséquent, nous devons le traiter comme tel, même si ce doit être en appliquant des peines moins longues. Parce que jadis l’Eglise ne donnait pas la communion avant sept ans à quelqu’un qui avait commis un adultère ou jusqu’à la fin de sa vie à un meurtrier, nous n’avons pas le droit, aujourd’hui encore, de nous contenter d’avouer en confession de tels péchés et de communier tout de suite après la confession. »

Père André Borrély, in Orthodoxes à Marseille octobre-novembre 2002.